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« Ne pas citer des sources ne signifie pas leur absence », dit le conseil de presse belge

Il y a dans la plus récente décision du Conseil de Déontologie Journalistique de Belgique deux remarques universelles, concernant l’une le respect à la vie privée des gouvernants l’autre le secret des sources, qui peuvent éclairer bien des débats franco-français récents sur le journalisme.

Le CDJ était saisi par un personnage important du palais royal belge,  l’Intendant de la Liste civile du Roi, à propos du livre du journaliste Frédéric Deborsu Question(s) Royale(s), enquête sur le Roi Albert II et la famille royale belge qui a défrayé la chronique en 2012.

A l’évidence, le plaignant estime qu’il y a crime de lése-majesté. Mais cela ne relève bien sûr pas des compétences déontologiques du CDJ, et il a donc porté plainte pour  publication de rumeurs et d’insinuations, non respect de vie privée de personnalités publiques, plagiat, non respect du « off », et confusion entre faits et opinions. L’essentiel de ces accusations contre Frédéric Deborsu sont rejetées par le CDJ – lire ici pour les détails.

Comme souvent, c’est le raisonnement sur les pratiques professionnelles qui fait, au moins pour qui n’est pas citoyen belge, tout l’intérêt de cette décision.

Il y a d’abord  la validation de la démarche générale d’enquête sur la vie d’un chef d’état: « il est tout à fait légitime de considérer la monarchie comme sujet potentiel pour le journalisme d’investigation. La sympathie qu’une partie de la population éprouve pour la famille royale ne peut faire obstacle à un tel travail », écrit le CDJ. Il rappelle ensuite que l’intérêt général peut justifier d’enquêter davantage sur la vie privée des gouvernants : « la sphère privée d’une personnalité publique est plus réduite que pour les anonymes mais ne disparaît pas totalement, écrit le CDJ. Il préconise d’évaluer cette notion d’intérêt général au regard de « l’importance [de cette ] information pour le débat démocratique et le lien entre le fait privé et l’exercice d’un rôle public. »

La seconde réflexion générale du CDJ concerne l’anonymat des sources. Le plaignant considérait que les informations non précisément sourcées étaient des rumeurs et des insinuations. Les sages ont analysés chaque accusations, entendu le journaliste et retenu ses arguments évoquant  » la retranscription d’informations obtenues auprès de sources nombreuses et recoupées et qui ne peuvent être citées ». D’où cette affirmation claire : »Ne pas citer ces sources ne signifie pas leur absence ». Mais aussi ce rappel : « soit un journaliste détient des informations sourcées lui permettant d’affirmer un fait et il l’exprime ainsi, soit il ne dispose pas de telles informations mais alors il ne doit pas en parler plutôt que d’émettre des sous-entendus« . P.G.

Offshore-leaks et secret des sources:un journaliste n’est pas un policier

Après la publication de milliers d’informations sur les paradis fiscaux par plusieurs journaux du monde entier, les pouvoirs politiques tentent d’obtenir les sources des journalistes. En vain. Ainsi les autorités belges ont demandé à plusieurs journalistes de livrer leurs informations. Le Conseil de déontologie a du publier un communiqué rappelant que la loi belge du 7 avril 2005 « permet aux journalistes de ne pas révéler les informations permettant de remonter aux sources ». Il ajoute solennellement « les journalistes et les médias ne sont pas des auxiliaires de la police, de la justice ou de l’administration. A chacun son rôle. Les médias doivent pouvoir respecter la confidentialité des sources afin de conserver leur confiance et de garantir ainsi la continuité de l’accès aux informations d’intérêt général ».

En France, Bernard Cazeneuve, le ministre du budget, avait annoncé à  l’Assemblée Nationale qu’il demandait « à la presse qui dit détenir des éléments et des fichiers de bien vouloir les communiquer à la justice de manière à ce que celle-ci puisse faire son travail ».  Il s’est fait tancé par Le Monde. Dans un éditorial,  le quotidien rejette « toute demande, qu’elle soit judiciaire ou gouvernementale, de transmission de données »,  au nom de la protection des sources et de la règle selon laquelle « le journaliste ne doit en aucun cas confondre son rôle avec celui du policier ou du justicier ».

Au Canada le gouvernement fédéral  dit envisage d’utiliser  des moyens judiciaires pour obtenir cette liste. La première ministre du Québec, Pauline Marois, souhaite  que les autorités fiscales provinciales aient la liste  des quelques 40  Québécois désignés comme ayant des comptes dans des paradis fiscaux. CBC/Radio-Canada, membre du consortium de journaux qui a publié les « offshore leaks » a refusera de livrer ses sources. « Si on se met à révéler les sources, d’une part on semble faire le travail de la police, et d’autre part, on dirait à tous les gens à qui on s’adresse pour avoir de l’information confidentielle qu’on va les trahir une fois qu’on aura l’information » a expliqué  Michel Cormier, le directeur de l’information de Radio-Canada. (mise à jour le 16 avril) lire ici le communiqué de la FEJ

« Fausse » mère-porteuse : un week-end de Panurge dans les médias

Une fausse « mère porteuse », vraie mythomane, est interviewée « en exclusivité » par Le Parisien, qui publie cet entretien samedi 9 mars. Quelle aubaine, un week-end de surcroît, pour les autres médias ! Le Landernau de la presse se précipite toutes affaires cessantes : chaînes d’information en continu, presse régionale, médias nationaux courent après leur confrère du matin. La planète média scintille. Jusqu’à ce qu’une journaliste plus consciencieuse, interrogeant la famille, découvre la vérité et brave le tintamarre déclenché par le faux scoop. Tout se dégonfle dans la journée du lundi 11 mars, les rectifications se succèdent, y compris celle du Parisien sur son site, qui omet toutefois de s’excuser auprès de ses lecteurs. Pas mieux à la télévision publique, et dans un  communiqué le SNJ de France Télévisions,  s’est élevé contre le suivisme de France 3 dans cette affaire.

Les emballements médiatiques se sont multipliés à partir des années 1990 lorsque le « système médiatique » a commencé à se renforcer et à devenir prégnant. L’affaire d’Outreau (2001-2006) en a été la triste illustration, mais DSK, Mohamed Merah ou le passage de témoin entre Benoît XVI et le pape François en ont illustré plus récemment la nocivité : presque toute l’actualité s’efface alors devant un seul de ses éléments… Raphaella, la fausse mère porteuse, n’aura été sous les sunlights que le temps d’un week-end, à l’issue duquel les moutons de Panurge sont rentrés piteux à la bergerie. Après avoir montré, une nouvelle fois, que la maladie endémique, celle qui porte le plus de coups à la crédibilité des médias et des journalistes, était bien la non vérification des informations. Un système médiatique qui vit en vase clos, où chacun s’épie et se copie, qui s’autoalimente au lieu d’aller à l’extérieur chercher sa nourriture, ne peut qu’amplifier cette grave dérive.

Le public n’attend pas cela. Il est plus curieux que les journalistes (un comble) et réclame au contraire que les médias ne se clonent pas entre eux, que France 2 soit différent de TF1, Le Monde du Figaro, ou que les chaînes en continu, au lieu de répéter à l’envi les mêmes informations, fassent preuve d’inventivité et de diversité dans leurs sujets. Or on lui propose  le même morceau joué non par des musiciens talentueux, mais par des machines servies par des DJ… Si les médias ne font pas l’effort d’aller sur le terrain rechercher des informations intéressantes, de se donner une identité forte, le public pourrait bien troquer ses critiques pour l’indifférence et l’abandon. Il a déjà commencé, hélas. Y.A.




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