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Le conseil de presse belge publie un guide sur l’information en situation d’urgence

Le Conseil de Déontologie Journalistique de Belgique francophone publie son huitième carnet de la déontologie, un petit livre numérique  consacré au travail des journalistes dans les situations d’urgence.  Ce sont bien sûr les événements de Paris en janvier 2015 qui ont conduit à approfondir une réflexion entamée dès 2012 par le CDJ belge, après le dramatique accident de car où 22 jeunes vacanciers avaient péri.

En 3 chapitres et 20 recommandations, le CDJ belge non seulement reprend les conseils traditionnels que doit connaître tout journaliste, mais y ajoute des considérations éthiques liées à ces nouvelles tendances que sont la généralisation du direct par tous les médias, l’omniprésence des réseaux sociaux et les stratégies de communication.

Au chapitre « organisation de la couverture en direct », on notera ce premier conseil qui joue l’expérience et le recul : « désigner dans la rédaction un ou une responsable chevronné(e) qui contribue à classer les informations selon leur pertinence , leur crédibilité et qui repère les risque de dérapage ». Bref, ne pas laisser seuls aux commande les plus jeunes à l’aise avec les outils de direct audiovisuel ou internet mais qui peuvent parfois être emportés par les possibilités techniques de ces outils jusqu’à oublier la rigueur du contenu.  Au chapitre « recherche et recoupement de l’information » l’accent est mis sur la nécessité de sourcer. Il est conseille de recouper y compris les sources officielles et de s’interroger sur les motifs de leur communication. Il est aussi préconisé d’affecter un(e) journaliste à l’identification des tentatives d’instrumentalisation du média . Mais les stratégie de communication ne sont pas l’apanage des sources officielles, et le CDJ, s’il estime que les « auteurs d’actes délictueux sont des sources potentielles comme d’autres »,  invite à la prudence « tant dans les questions posées que dans la sélection des réponses ». Ce qui exclut l’interview en direct d’un auteur de faits délictueux.

Dernier chapitre, sur la diffusion de l’information. Le média doit avoir conscience qu’il est témoin mais aussi volens nolens acteur, élément  de l’événement. Sa action pèse sur la perception voire le déroulement des faits, responsabilité sociale qu’il ne peut ignorer. Le CDJ donne plusieurs exemples de cette responsabilité dans le compte rendu en direct d’un événement dramatique : surveiller en permanence les images diffusée depuis le lieu de l’évènement et en interrompre la diffusion si nécessaire; signaler qu’on dispose d’informations dont on retarde la diffusion, non sous la pression des autorités, mais par choix éditorial responsable. »La liberté de la presse n’implique pas que toute information, même vérifiée, soit diffusée sans délai » souligne le Conseil de Déontologie Journalistique belge. C’est une des clefs éthique de la couverture d’une situation d’urgence en direct. PG

Télécharger ici  la « Recommandation sur l’information en situation d’urgence »du CDJ

Réguler la déontologie n’est pas évaluer la ligne éditoriale

L’évolution générale des mœurs et la course à l’audience des médias peut les conduire à traiter des sujets qui auraient été ignorés il y  a quelques années. Et amener un conseil de presse à rendre un avis déontologique circonstancié sur certains sujets qui font autant le « buzz » auprès d’une partie du public qu’ils en choquent une autre. Le Conseil de Déontologie Journalistique belge a ainsi récemment rejeté une plainte visant le site d’un important quotidien Dernière Heure accusé de pornographie.
L’article de Dhnet.be incriminé date du 30 juin dernier. Sous le titre « La sextape …de la gare du Midi (Vidéo) »  une photo du hall d’entrée de la grande gare bruxelloise où on distingue un couple dont on comprend, influencé par le titre lui même, qu’il se livre à un acte sexuel. Juste en dessous de cette saisie d’écran, un lien hypertexte rouge à cliquer : « Vidéo: sextape la gare du midi ». A l’évidence, tout est fait éditorialement pour que le lecteur ne manque pas cette vidéo – et la fasse circuler. L’article de 750 mots qui l’accompagne est factuel, et comprend une double mise en contexte sur les peines encourues par le couple et sur l’avis d’une sexologue sur l’exhibition. Il serait intéressant, puisque les outils de mesure d’audience le permette, de savoir qui de l’article et de la vidéo a eu le plus le visites. Ce qui, il est vrai, relève de la connaissance générale des médias et du public, pas de la déontologie journalistique…
Cette publication n’a en tout cas  pas plu à un lecteur – ou  plutôt l’a dans doute profondément choqué – et il  a donc saisi le CDJ. Il déplore que le journal ne sache plus quoi faire « pour attirer les lecteurs » et que  « cela ouvre la porte à toutes sortes de déviances ». Mais ce plaignant se rend bien compte que cette appréciation critique de la ligne éditoriale ne suffit pas à saisir le CDJ. Il argumente donc sur 3 violations à ses yeux du code de déontologie que seraient l’atteinte au droit à l’image et à la vie privée du couple et le non respect de la dignité humaine.
L’avis du CDJ est net. Il rappelle d’entrée qu’ « il n’est pas juge du bon et du mauvais goût, du respect plus ou moins commercial des choix rédactionnels ni du respect des bonnes mœurs ». Et réfute un à un les arguments du plaignant. Non sans humour lorsque par exemple il explique qu’il n’y a pas atteinte à la vie privée ou au droit à limage puisque « les personnes concernées ont rendu elles-mêmes leur image publique ou consenti de manière tacite mais certaine à l’hypothèse d’une prise de vues » . Surtout, le CDJ valide déontologiquement le travail de Dhnet.be qui a démontré avoir pris le temps d’authentifier le document vidéo et de masquer les visages des protagonistes, et a veillé « à avertir son public du caractère délicat » du sujet et de la vidéo tout en l’encadrant par des informations de contexte.
Chacun se fera son avis sur l’intérêt, le ton, l’objectif  de la publication de cette vidéo. Mais la décision et les attendus  du CDJ sont une belle démonstration qu’un conseil de presse n’est ni un censeur ni un gardien du politiquement correct ou de la pensée unique. Bref, que réguler  la déontologie n’est pas évaluer la ligne éditoriale. PG.




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