Le CSA persiste et signe. Il vient de publier une recommandation « relative au traitement des conflits internationaux, des guerres civiles et des actes terroristes par les services de communication audiovisuelle ». Des organisations professionnelles et et le club des médiateurs de presse avaient en juillet dernier fait part de leur questionnement sur « l’opportunité du CSA à se saisir de ces questions touchant à l’éthique professionnelle » . Le CSA n’en a pas moins arrêté cette recommandation, qui, après publication au Journal Officiel, s’imposera à tous les acteurs du secteur.
Posant que « si la liberté d’informer (…) doit être préservée, le diffuseur doit également respecter la dignité de la personne humaine et l’honnêteté de l’information » cette recommandation invite les « éditeurs [à] veiller au respect des principes suivants : dignité de la personne humaine, ordre public et honnêteté de l’information, protection des personnes » . Les chaînes sont donc invitées à ne pas « présenter de manière manifestement complaisante la violence ou la souffrance humaine » . Il n’est pas sans intérêt ici de rappeler que le CSA s’est saisi de ces questions après des protestations suscitée par un reportage d’ « Envoyé Spécial » (France 2) en février dernier montrant des victimes d’exactions attribuées à l’armée malienne. Images qui ont été à peu près les seules à montrer des morts dans la couverture de ce conflit, devenu ainsi de facto pour les téléspectateurs français une guerre sans victime.
La notion de préservation de l’ordre public conduit le CSA à appeler à la pondération et à la rigueur dans la couverture des « conflits internationaux susceptibles d’alimenter des tensions et des antagonismes au sein de la population ou d’entraîner, envers certaines communautés ou certains pays, des attitudes de rejet ou de xénophobie ». C’est suffisamment large et flou pour permettre toutes les pressions sur les rédactions et les journalistes. Cela veut il dire que rigueur et pondération ne seront pas nécessaires pour évoquer un conflit dont les français se désintéressent ?
Pour l’APCP, ce texte est dans la continuité de précédentes démarches du CSA , qui ne concernent plus le respect de la loi, ni même la déontologie de l’information, mais la pratique journalistique et la ligne éditoriale de telle ou telle chaîne - lire ici. Il rend encore plus nécessaire la prise de conscience par tous de l’urgence d’une instance d’autorégulation de la déontologie journalistique dont l’absence ouvre un espace pour une règlementation administrative du contenu de tous les médias. Olivier Schrameck n’a pas caché en effet que le contenu des sites internet concernait à ses yeux le CSA, et que les règles « de l’État de droit et de la vie en société, [de la] protection de la vie personnelle des gens, des jeunes publics et des publics sensibles » sont « des règles qui doivent s’imposer quels que soient le contenu et les canaux» (sur France Inter le 24 juillet – écouter ici à 4’34)
Le Syndicat National des Journalistes (SNJ) envisage de saisir le Conseil d’Etat de cette recommandation, qui constitue selon lui un excès de pouvoir, « la loi ne donn[ant] pas mission au CSA de traiter de la déontologie des journalistes » – voir ici.
Le Syndicat des Agences de Presse Télévisée a également déploré cette décision du CSA. lire son communiqué
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