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Reporters sans frontières : les conseils de presse permettent aux journalistes de s’exprimer

Interrogé le 13 janvier sur le site terraeco.net, Antoine Héry, responsable « Europe » de Reporters sans frontières (RSF), a commenté le classement de la France en 39ème position mondiale pour la liberté de la presse. « Cela s’explique [notamment] par le manque d’indépendance des rédactions vis-à-vis des annonceurs et des patrons de presse. Ce n’est pas un problème incontournable mais, moins tangible, il peut aussi être plus sérieux que des atteintes directes à la liberté de la presse (…) Le fait que le secret des sources puisse être violé par des magistrats est aussi un point d’accrochage. (…) C’est pour cela que nous réclamons une législation plus restrictive et plus précise. Cette question cristallise une autre problématique : celle du respect de la fonction sociale du journaliste, une fonction qui a tendance à être malmenée en France. »

Un conseil de presse  permettrait de régler des problèmes de déontologie

Les trois premiers du classement sont la Finlande, les Pays-Bas, la Norvège. Dans ces pays, note Antoine Héry, le respect pour la liberté de la presse est notamment dû à « l’articulation entre la position sociale du journaliste et le reste de la société. Le journaliste a un rôle à jouer et il est respecté pour ça. L’usage démocratique fait que même le rédacteur en chef a du mal à imposer sa volonté à un journaliste. Il existe certains mécanismes qui protègent les rédacteurs : des associations de journalistes plus fortes qu’en France, des conseils de presse qui leur donnent la possibilité de s’exprimer sans aucun contrôle. » Antoine Héry  poursuit : « Le débat pour l’instauration d’une instance similaire existe en France. Un conseil pourrait permettre de régler des problèmes de déontologie. Au Québec où le système existe, ce conseil est encadré par un président entouré d’un collège tripartite formé de patrons de presse, de journalistes et de la société civile. Il est saisi de cas de violations de la charte éthique des journalistes et garantit le maintien d’un écosystème vertueux. »

En Belgique, deux démonstrations du rôle d’un conseil de presse

Le conseil de presse est de plus en plus incontournable dans le paysage médiatique de Belgique. On devrait dire les conseils de presse, puisque, fédéralisme oblige, il y a deux organes indépendants de régulation en Belgique, le Raad voor de Journalistiek flamand et le Conseil de Déontologie Journalistique francophone. Deux affaires ont  ces dernières semaines validé leur nécessité.

La plus importante symboliquement est certainement la décision fin octobre de la Cour d’appel de Bruxelles. Elle avait à se prononcer sur la demande du journaliste Eric Verbeeck : son site Morsum-Magnificat avait fait l’objet d’un avis négatif du Raad voor de Journalistiek (RvdJ) saisi d’une  plainte d’une personnalité locale. Ce journaliste  avait déjà été blâmé à  deux reprises par le RvdJ, pour conflit d’intérêt et pour atteinte à la vie privée. Il n’avait pas apprécié la publication de ces premiers avis sur le site du RvdJ. Il avait donc en 2009 saisi un tribunal pour obtenir l’interdiction de publication de ce nouvel avis. Pour lui, le conseil de presse flamand était juridiquement incompétent à donner un avis sur son article, puisqu’il n’était pas journaliste professionnel et que ce conseil n’avait pas été établi par la loi. Le tribunal lui a donné raison le 24 juin 2009, infligeant en sus une contrainte de 5000 euros par publication si le Raad voor de Journalistiek ne respectait pas cette interdiction de publier son avis. Ici l’analyse de cette décision (en flamand)

 Validation du rôle d’un conseil de presse

 Cinq après, la Cour d’Appel de Bruxelles vient d’inverser la décision. Elle fonde son analyse sur le droit de la liberté d’expression et l’importance de l’autorégulation par les médias. Elle estime que le conseil de presse a le droit de s’exprimer publiquement sur les questions de déontologie. Son arrêt ne se limite pas à un rappel du respect absolu de  la liberté d’expression. Il précise le rôle social du conseil de presse qui «vise un journalisme de qualité », qui  représente et défend « l’éthique journalistique » et formule « des lignes directrices déontologiques pour la pratique journalistique». La cour d’appel de Bruxelles ajoute enfin que le conseil de presse est fondé à exprimer un avis sur tout ce qui est concerne les « pratiques et les contenus journalistiques » quelque soit le support et le statut de l’auteur. Ici le communique du RvdJ (en flamand)

Le Conseil de Déontologie Journalistique  francophone se réjouit de cette validation du rôle et de l’importance de l’autorégulation en matière d’éthique des médias. Il s’en estime d’autant plus conforté que « la situation du CDJ est encore plus claire [que celle du RvdJ] puisqu’un Décret du Parlement de la Communauté française et un autre du Parlement de la Communauté germanophone établissent sa légitimité ».

Quelques jours plus tard, ce même CDJ n’a pas hésité, peut être fort de cette légitimité indirectement validée par cet arrêt, à répondre publiquement à une tribune signée par deux avocats.

 Menaces sur l’investigation journalistique

Leur colère a été provoquée par le contenu de certains médias dans la couverture du dernier feuilleton de la vie publique belge : la mise en cause de Jean Charles Luperto, une  importante personnalité politique wallonne, pour outrage public aux mœurs en présence de mineurs. Outrés par ce qu’ils ont lu – et qui a conduit selon eux  l’élu à démissionner de ses mandats pour, selon la formule habituelle, « se consacrer à sa défense »  - les deux auteurs se prononcent en faveur de l’instauration d’un embargo sur les enquêtes policières et judiciaires, embargo qu’ils veulent « verrouillé par des sanctions d’une extrême rigueur ». Et ils concluent leur réquisitoire par l’affirmation  que « la liberté de la presse est devenue une putain. »

L’expression a fait parler. La réplique est venue notamment du président du Conseil de déontologie journalistique. Journaliste confirmé aujourd’hui patron d’une télévision privée, Marc de Haan récuse dans sa contre tribune l’idée de contraindre les journalistes au silence sur les enquêtes en cours au nom du respect de la présomption d’innocence. Aller dans ce sens «  aurait pour effet d’empêcher l’investigation journalistique, confinant la presse à la seule vérité judiciaire » écrit le président du CDJ.

Mais il ne nie pas les dérives déontologiques, et reconnaît qu’il a parfois « honte » de ce qu’il lit sous la plume de « certains confrères qui sacrifient au buzz les nobles valeurs de notre profession« . Ces excès nourrissent « la tentation de répression de l’activité journalistique » que Marc de Haan sent monter. Il cite les prises de position de la Commission européenne sur le droit à l’oubli sur internet, qui « menacent la possibilité d’un traitement journalistique des données personnelles« , ou la volonté de certains parlementaires belges « d’élargir l’obligation légale de respect de la présomption d’innocence aux journalistes« , voire de « tout bonnement [de] les chasser des tribunaux ».

Marc de Haan répond aux polémistes que « la liberté d’expression [peut] effectivement être mise au service du mal, mais [son] absence, c’est le mal lui-même.… ». Et le président du Conseil de déontologie journalistique plaide, au nom des journalistes comme au nom du public,  pour l’autorégulation d’une profession qui ne veut pas «  laisser tirer vers le bas ses normes éthiques« . P.G.

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