Cela faisait plusieurs années qu’un média n’avait pas créé de poste de médiateur. C’est fait à La Montagne avec Bernard Stéphan, qui est aussi rédacteur en chef adjoint. Le quotidien de Clermont-Ferrand et de sa région (groupe Centre France) a accompagné cette nomination d’un engagement au sein de l’Observatoire de la déontologie de l’information (ODI).
`Le premier médiateur en France n’a été créé qu’en 1994 – très longtemps après les premier s médiateurs au Japon, dans les années 1930, ou aux Etats-Unis (1967) – puis il a essaimé dans les chaînes de radiotélévision publique et dans la presse régionale ; il y a eu aussi des médiateurs dans certains hebdomadaires (La Vie, L’Express). Après avoir compté jusqu’à quinze membres, le Cercle des médiateurs de pre sse, structure informelle créée en 2006 et actuellement présidée par Marie-Laure Augry (France 3), était retombé à neuf[1] après la défection de plusieurs entreprises (l’ancienne RFO, La Dépêche du Midi, Midi libre, Le Parisien, L’Est républicain notamment).
La fonction a donc perdu quantitativement de son importance, les difficultés financières l’ont notamment affectée. Elle s’est aussi affadie. Un médiateur de presse est en France un journaliste chevronné, réputé impartial, qui doit être « l’avocat du public auprès de la rédaction et l’avocat de la rédaction auprès du public », selon la formule de l’excellent Robert Solé, qui le fut huit années au Monde. Le médiateur, en théorie, n’hésite pas à donner publiquement tort à sa rédaction dans une chronique ou une émission, bien qu’il soit salarié de l’entreprise ; son indépendance est le gage de sa crédibilité. On se souvient par exemple de certains plateaux de « L’hebdo du médiateur » (France 2), avec Jean-Claude Allanic… mais cette émission a disparu depuis plusieurs années, à la demande de la direction de la rédaction. Les hiérarchies rédactionnelles, en effet, ne le voient pas toujours d’un bon œil lorsqu’il assume sa responsabilité jusqu’au bout. Mais les rédactions sont aussi de plus en plus soumises à la loi du marketing. Du coup, la médiation entre un lecteur, auditeur ou téléspectateur mécontent et le média s’est estompée, au profit le plus souvent d’un louable développement des « bonnes relations » avec le public.
Le rapport de Marie Sirinelli « Autorégulation de l’information : comment incarner la déontologie ? »[2], remis le 13 février 2014 à la ministre de la culture et de la communication, est peut-être de nature à remettre les pendules à l’heure et à favoriser le développement des médiateurs de presse. Il concluait en effet sur la difficulté à créer dès aujourd’hui une instance nationale de déontologie de l’information, et préconisait de renforcer l’ODI et de s’intéresser aux médiateurs. Du coup, le Cercle des médiateurs de presse a demandé au ministère de donner un coup de pouce en mettant en œuvre une mesure fiscale inspirée par une recommandation de l’ OSCE (Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe). Une réponse favorable de principe lui a été donnée en juin.
Faire connaître l’intérêt de la médiation pour les médias est aussi important : le Cercle organise aux Assises du journalisme à Metz (17 octobre, 11h) un débat « Pour de nouveaux médiateurs ». Après une mauvaise passe, une embellie pourrait avoir lieu. Afin de lui donner son efficacité, il faudrait au médiateur de presse un « statut » minimal, garantissant son indépendance ; le Cercle dispose d’un projet de ce type. Y.A.
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