Dans la foulée d’une décision prise à son dernier congrès, en octobre 2013, le Syndicat national des journalistes a organisé six « ateliers déontologie » à Angers, Rouen, Lyon, Strasbourg Marseille et Paris. Dominique Pradalié, secrétaire générale et porte-parole, et Pierre Ganz, membre de la commission déontologie du syndicat, sont allés à la rencontre des journalistes d’un titre, ou d’une section locale, qui souhaitaient témoigner de leurs difficultés et quelque peu regonfler leurs batteries.
Ce qui ressort de l’étude de cas concrets ? D’abord le traitement sensationnaliste de l’information. Ainsi au Courrier de l’Ouest, dont le délégué syndical, Emmanuel Poupard, a organisé le premier des ateliers : « Depuis l’arrivée d’un nouveau rédacteur en chef, la ligne éditoriale du titre a changé, il faut vendre du fait divers à tout prix, au mépris parfois de la réalité de l’information ». Les journalistes, confrontés à des commandes d’articles « farfelues », doivent se soumettre ou biaiser; pour marquer leur désaccord, ils observent depuis mars une grève des signatures. Autres doléances partagées dans les ateliers : la confusion entre information et communication, la primauté du marketing, l’improvisation érigée en règle. « Derrière ces dérives, c’est bien un mépris à l’égard du travail de terrain qui se manifeste », estime Pierre Ganz. « Nos directions préfèrent fabriquer de l’info plutôt que la collecter et la diffuser », renchérit Emmanuel Poupard.
Les journalistes sont ainsi confrontés à des conditions de travail « choquantes », selon Dominique Pradalié, qui a plaidé pour la solidarité entre collègues : « Les rédactions souffrent de la disparition de tout lieu et de tout temps d’échange professionnel ». Mais elle a aussi rappelé le rôle des institutions représentatives du personnel et ouvert des pistes d’action juridique. « La déontologie, naguère considérée comme une question personnelle, est redevenue un enjeu professionnel et collectif, assure la secrétaire générale du SNJ en charge de ces questions. Les journalistes ont conscience que sans information de qualité, leur profession pourrait bien disparaître ». Pour pouvoir maintenir le cap, estime le SNJ, il leur faut des garanties, explicitement revendiquées par le syndicat depuis 2012 : une charte déontologique unique (*), la reconnaissance juridique des équipes rédactionnelles et une instance nationale de régulation professionnelle. Sur le métier des « ateliers déontologie », les participants ont même examiné le fonctionnement de conseils de presse existants, notamment celui de Belgique francophone. Bertrand VERFAILLIE
(*) Pour le SNJ, qui prône la défense des intérêts moraux des journalistes autant que celle de leurs intérêts matériels, celle rédigée par ses fondateurs en 1918 et réactualisée en 1938 et 2011.
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